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Une classification climatique du Québec à partir de
modèles de distribution spatiale de données climatiques mensuelles :
Vers une définition des bioclimats du Québec
1. Méthode2 et résultats
Le développement d’un modèle climatique matriciel fait
partie du projet NATGRID (National Georeferenced Information for Decision Makers).
Ce travail a été rendu possible par la réalisation du
nouveau modèle numérique d’altitude (MNA) validé sur le plan hydrologique
et dérivé de la numérisation des cartes topographiques à 1 : 250 000.
Les données du Québec sont enregistrées selon une maille de deux kilomètres,
le territoire étant divisé en cellules (pixels) de quatre kilomètres2 chacune.
Chaque cellule est identifiée par un numéro et possède son propre attribut d’altitude
auquel viendront s’adjoindre toutes les données climatiques engendrées par
le modèle d’interpolation spatiale climatique.
Le mode d’interpolation spatiale climatique a été
programmé dans l’algorithme ANUSPLIN (pour Australian National University
Multi-dimentional thin-plate SPLINes) développé par M.F. Hutchinson de la
Australian National University (Hutchinson, 1987). ANUSPLIN génère des «
spline coefficient surfaces » qui sont traduits en valeurs climatiques par
couplage avec le MNA. La validation des résultats est effectuée en retenant
les données d’un certain nombre de stations météorologiques. Les « spline
coefficient surfaces » sont calculés sans ces données et les valeurs
prédites sont ensuite comparées avec les valeurs observées dans les stations
retenues.
La méthode comprend trois étapes, soit :
-
l’interpolation spatiale
climatique;
-
la construction de la base de
données spatiales et,
-
la classification climatique.
2 L’essentiel
des informations fournies ici est extrait de l’article de Mackey et al. (1996)
et d’un compte rendu informel des interventions de McKenney dans un
atelier tenu sur le sujet en 1999.
Figure 1. Distribution des stations
météorologiques du Québec utilisées
1.1 Interpolation spatiale climatique
Les données climatiques proviennent de la compilation des 396 stations
météorologiques du ministère de l’Environnement du Québec (figure
1)
auxquelles furent ajoutées environ 150 stations supplémentaires provenant du
fichier canadien national surfaces. Ces stations ont des données
enregistrées sur une période de 30 ans, de 1966 à 1996.
La méthode d’interpolation spatiale (thin-plate procedure) permet l’utilisation
simultanée de plus de deux variables indépendantes. Ainsi, à la latitude (y)
et la longitude (x) des stations
météorologiques, on peut ajouter l’altitude (z)
comme troisième variable indépendante. L’interpolation spatiale climatique
est alors partiellement empirique (latitude, longitude) et partiellement
fonctionnelle (altitude). L’interpolation spatiale climatique, en mettant en
relation les données climatiques mensuelles moyennes de température et de
précipitation avec les trois variables indépendantes (x,
y, z) permet une estimation des températures mensuelles moyennes
minimales et maximales ainsi que des précipitations ce, pour tout lieu où ces
trois variables indépendantes sont connues. De là, sont dérivés des
paramètres climatiques à connotation plus biologique, tels le nombre annuel de
degrés-jours de croissance et la durée annuelle moyenne de la saison de
croissance.
Neuf valeurs climatiques ont ainsi été calculées pour chaque pixel de 4
kilomètres2, soit :
-
Température annuelle moyenne (oC);
-
Amplitude journalière moyenne des températures (oC);
-
Température moyenne des trois mois les plus
chauds (oC);
-
Température moyenne des trois mois les plus
froids (oC);
-
Précipitation annuelle totale en millimètres;
-
Précipitation en millimètres des trois mois les
plus chauds;
-
Précipitation en millimètres des trois mois les
plus froids;
-
Durée annuelle moyenne de la saison de croissance
en jours;
-
Nombre annuel de degrés-jours de croissance (oC).
Le nombre annuel de degrés-jours de croissance est obtenu en calculant la
somme annuelle des températures quotidiennes moyennes supérieures à 5 oC.
La saison de croissance est considérée comme débutant dès que la
température quotidienne moyenne, pendant cinq journées consécutives après le
1er mars, est égale ou supérieure à 5 oC. Elle se
termine quand, à partir du 1er août, la température quotidienne
minimale est inférieure à - 2 oC.
1.2 Construction de la base de données spatiales
Le modèle numérique d’altitude (MNA) est une matrice régulière de
latitude et de longitude à l’intérieur de laquelle l’altitude de chaque
intersection est estimée et enregistrée. Le MNA à 1:250 000 de Géomatique
Canada a été utilisé comme base de données spatiale pour la prédiction des
variables indépendantes.
Quoique le MNA original soit d’une précision de l’ordre de 100 mètres,
la grandeur moyenne des pixels retenus pour l’analyse spatiale est de deux
kilomètres ce, afin de réduire la taille de la base de données et le temps de
calcul vu les dimensions du Québec (environ 1 500 000 kilomètres2
de surface intérieure).
1.3 Classification climatique
La base de données spatiales fournit, à chaque pixel, une valeur pour les
neuf variables climatiques retenues. On peut ainsi représenter leur
distribution spatiale (figures 2 à 10). Même si prise individuellement, les
cartes ainsi obtenues présentent un intérêt certain pour la compréhension du
climat du Québec, une image intégrée des neuf variables est essentielle pour
une compréhension globale. La méthode de classification agglomérante non
hiérarchique (ALOC; Belban, 1987) a été appliquée aux données de la
matrice. Cette méthode permet de choisir les attributs et leur pondération, de
contrôler la mesure d’association utilisée pour estimer la non-similarité
entre les pixels et de décider du nombre de classes. Tous les attributs se sont
vu accorder un poids égal, et la mesure d’association retenue est la distance
de Gower (Gower, 1971). Quinze, vingt, trente et cinquante classes ont ainsi
été calculées en faisant varier les seuils d’association.
Figure 2 -
Température annuelle moyenne (oC)
Figure 3 - Amplitude journalière moyenne des
températures (oC)
Figure 4 – Température moyenne des trois mois
les plus chauds (oC)
Figure 5 – Température moyenne des trois
mois les plus froids (oC)
Figure 6 – Précipitation annuelle totale
en millimètres
Figure 7 – Précipitation en millimètres
des trois mois les plus chauds
Figure 8 – Précipitation en millimètres
des trois mois les plus froids
Figure 9 – Durée annuelle moyenne de la
saison de croissance en jours
Figure 10 – Nombre annuel de degrés-jours
de croissance
À chaque pixel a ensuite été attribuée une classe à l’intérieur des
quatre classifications. Quelques valeurs statistiques – « minimum », «
maximum », « moyenne » –, ont enfin été calculées à
chaque classe (tableau 1 et annexe 1). La figure 11 présente la distribution
spatiale de la classification climatique en quinze classes.
Figure 11 –
Classification climatique en 15
classes
Enfin, une classification hiérarchique a été produite à partir des
résultats du processus d’agglomération qui met en évidence les affinités
intergroupes.
Figure 12 -
Dendrogramme de la classification
climatique en 15 classes
Tableau 1 : Température moyenne annuelle de la classification en 15 classes
Classe |
Minimum |
Moyenne |
Maximum |
1 |
- 10,5 |
- 8,25 |
- 5,6 |
2 |
- 6,8 |
- 5,48 |
- 4,0 |
3 |
- 11,2 |
- 6,84 |
- 5,5 |
4 |
- 7,5 |
-6,48 |
-4,9 |
5 |
-5,3 |
- 3,92 |
- 2,2 |
6 |
- 5,7 |
- 3,91 |
- 2,2 |
7 |
- 4,8 |
- 2,30 |
- 0,1 |
8 |
- 3,5 |
- 1,71 |
- 0,2 |
9 |
- 3,4 |
- 1,86 |
0,0 |
10 |
- 2,5 |
- 0,42 |
1,4 |
11 |
0,9 |
2,19 |
3,9 |
12 |
- 1,5 |
0,59 |
3,5 |
13 |
-1,0 |
0,13 |
1,3 |
14 |
2,9 |
4,55 |
6,6 |
15 |
- 0,4 |
1,57 |
3,7 |
1.4 Classification de Litynski
La classification climatique mondiale de Litynski (1988) a
été appliquée à notre classification climatique en 15 classes pour aboutir
à un regroupement en 12 classes (tableau 2, figure 15).
Tableau 2. Caractéristiques sommaires des climats du Québec
Classes selon
Litynski |
Région climatique |
Température (*) |
Précipitation (*) |
Saison de
croissance |
1 |
1 |
polaire |
semi-aride |
très courte |
2 |
2 |
subpolaire froide |
modérée |
très courte |
3 |
3 |
polaire |
modérée |
courte |
4 |
4 |
polaire |
modérée |
très courte |
5 |
5 |
subpolaire froide |
modérée |
courte |
6 |
6,7 |
subpolaire froide |
sub-humide |
courte |
7 |
8,9 |
subpolaire froide |
sub-humide |
moyenne |
8 |
10 |
subpolaire |
humide |
courte |
9 |
11 |
subpolaire douce |
sub-humide |
longue |
10 |
12,13 |
subpolaire |
humide |
moyenne |
11 |
14 |
modérée |
sub-humide |
longue |
12 |
15 |
subpolaire |
sub-humide |
moyenne |
* Subdivisions de la classification mondiale de Litynski (1988).
Mise à jour : 10 Janvier 2002
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