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Qualité des eaux du bassin de la rivière Etchemin,
1979-1999
Introduction
À l’intérieur de son mandat de suivi de l’impact des ouvrages d’assainissement
urbain et des nombreuses interventions d’assainissement industriel et
agricole, la Direction du suivi sur l’état de l’environnement (DSEE),
secteur milieu aquatique, du ministère de l’Environnement gère un réseau d’échantillonnage
des rivières établi sur une quarantaine de bassins hydrographiques. La
qualité générale de l’eau des rivières est établie sur la base de
descripteurs physico-chimiques conventionnels de l’eau, excluant de ce fait
les pesticides, les métaux et autres toxiques.
En 1995, la Direction des écosystèmes aquatiques (aujourd’hui la DSEE,
secteur milieu aquatique) publiait un rapport sur la qualité de l’eau du
bassin de la rivière Etchemin. Celui-ci était fondé sur un échantillonnage
mensuel continu effectué entre 1979 et 1994 à trois stations principales ainsi
que sur les données colligées à deux stations secondaires visitées dans le
contexte de tournées estivales en 1990, 1992 et 1993 (Robitaille, 1995).
Tous les détails de l’analyse et l’interprétation des données recueillies
au cours de cette période se trouvent dans le rapport cité ci-dessus.
Depuis la publication de ce rapport, plusieurs interventions d’assainissement
ont été effectuées dans les milieux urbain, industriel et agricole. Aussi,
afin d’avoir en main un portrait récent qui rende compte des différentes
interventions d’assainissement accomplies depuis 1994, la DSEE a procédé à
l’interprétation des données sur la qualité de l’eau recueillies depuis
la publication du dernier rapport (Robitaille, 1995), et a repris l’analyse
des séries temporelles depuis les vingt dernières années.
L’étude actuelle est fondée sur l’échantillonnage de l’eau du bassin
de la rivière Etchemin ayant eu lieu de janvier 1979 à août 1999. L’interprétation
des résultats est effectuée à l’aide de différents outils tels l’indice
de la qualité bactériologique et physico-chimique de l’eau (IQBP), les
dépassements des critères de protection de la vie aquatique et des différents
usages récréatifs de l’eau, les flux massiques d’azote et de phosphore et
l’analyse des séries temporelles. L’étude permet d’obtenir un portrait
récent de la qualité de l’eau du bassin de la rivière Etchemin ainsi que de
son évolution dans le temps. Des liens sont établis avec les différents
paramètres socio-économiques pouvant influencer la qualité des cours d’eau,
qu’il s’agisse des pressions de pollution exercées sur les eaux de surface
ou des réponses apportées au problème par les différentes interventions d’assainissement.
Description de l'aire d'étude
Figure 1 : Bassin hydrographique de la rivière Etchemin et localisation des
stations d'échantillonnage
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Le bassin de la rivière Etchemin couvre une superficie de 1 466 km2.
Situé sur le côté sud du fleuve Saint-Laurent, il est borné au sud-ouest par
le bassin de la rivière Chaudière et au nord-est par les bassins de la
rivière du Sud et de la rivière Boyer. La rivière Etchemin prend sa source
dans le secteur des monts Notre-Dame. Des massifs appalachiens, elle coule dans
le piedmont, secteur où le réseau hydrographique est le plus étendu. Elle
atteint ensuite les basses-terres du Saint-Laurent (figure 1). La rivière
Etchemin est longue de près de 123 km ; elle est alimentée par huit
affluents drainant des superficies de plus de 40 km2,
dont sept se trouvent dans le piedmont. La rivière se jette dans le fleuve
Saint-Laurent à la hauteur de Saint-Romuald. L’aire d’étude comprend deux
secteurs, l’un en amont et l’autre en aval de la municipalité de
Sainte-Claire.
Utilisation du territoire
La forêt, dont 84 % se trouve dans le secteur situé en amont de la
municipalité de Sainte-Claire (tableau 1), couvre plus de la moitié de la
superficie du bassin. L’agriculture, quoique plus intensive dans le secteur
des basses-terres, est établie partout sur le territoire. En aval de
Sainte-Claire, on dénombre 63 % de toutes les terres cultivées et
59 % du cheptel total. Néanmoins, on observe que les trois municipalités
montrant les plus fortes densités animales se trouvent dans le piedmont en
raison d’un important cheptel et du nombre restreint de terres cultivées. C’est
le cas des municipalités de Saint-Damien-de-Buckland, de
Saint-Nazaire-de-Dorchester et de Saint-Malachie, pour lesquelles la densité
animale est de plus de 3 unités animales par hectare cultivé (u.a./ha).
En 1996, les statistiques agricoles (Statistique Canada, 1997) montraient que le
bassin de la rivière Etchemin était caractérisé par un cheptel en majorité
de type porcin (54 %). Ce n’était pas le cas en 1976, alors que les
bovins représentaient 58 % des unités animales. Au total, au cours de
cette période de vingt ans, le cheptel bovin a augmenté de 17 728 u.a..
(30 %) alors que la production porcine a augmenté de 19 630 u.a.
Ce phénomène, couplé à une baisse des superficies cultivées, fait que la
densité animale n’a cessé de croître sur le bassin : au cours des années
1976, 1986 et 1996, elle est passée de 1,5 à 1,9 u.a./ha, puis à
2,4 u.a./ha. La densité animale observée sur le bassin de la rivière
Etchemin en 1996 est plus élevée que les densités enregistrées sur les
bassins des rivières Chaudière (2,0 selon Simoneau et al., 1998)
et Yamaska (1,5 selon Primeau et al., 1999), pourtant reconnus pour leur
vocation agricole importante. Les statistiques agricoles détaillées par
municipalité pour les années 1976, 1986 et 1996 se trouvent à l’annexe 1.
Tableau 1 - Utilisation du
territoire du bassin de la rivière Etchemin, par secteur
Caractéristiques |
Secteur amont |
Secteur aval |
Total |
Superficies drainées (ha) |
102 300 |
70 % |
44 900 |
30 % |
147 200 |
Utilisation du territoire |
· Forêts (ha) |
68 370 |
84 % |
12 545 |
16 % |
80 915 |
· Superficie urbaine (ha) |
1 600 |
40 % |
2 400 |
60 % |
4 000 |
· Lacs (ha) |
500 |
83 % |
100 |
17 % |
600 |
· Superficie agricole non cultivée (ha) |
19 980 |
67 % |
9 786 |
33 % |
29 766 |
· Superficie cultivée (ha) |
11 850 |
37 % |
20 069 |
63 % |
31 919 |
· Cheptel (unité animale) |
31 528 |
41 % |
44 535 |
59 % |
76 063 |
· Densité (unité animale/hectare
cultivé) |
2,7 |
|
2,2 |
|
2,4 |
· Population (nombre) |
14 053 |
33 % |
28 345 |
67 % |
42 398 |
Sur le plan démographique, les pressions sont aussi plus fortes dans le
secteur aval. Ce dernier, quoiqu’il ne couvre que 30 % du territoire,
accueille près de 67 % des 42 398 habitants du bassin. La
municipalité la plus populeuse du bassin est celle de Saint-Jean-Chrysostome.
Au cours des vingt dernières années, elle a subi un accroissement moyen de
plus de 600 personnes par année. Elle totalisait, en 1998, 17 229
individus. De 1979 à 1998, la population du bassin de la rivière Etchemin a
augmenté de 45 %; 94 % de cette augmentation est attribuable à la
popularité de la municipalité de Saint-Jean-Chrysostome. Les statistiques
démographiques par municipalité se trouvent à l’annexe 2.
Plus d’une centaine d’entreprises manufacturières sont installées sur
le bassin de la rivière Etchemin. Elles sont actives dans les domaines de la
transformation métallique, des produits du bois, de l’agro-alimentaire et de
la chimie. Toutefois, l’ensemble de celles-ci ne porte pas préjudice au
milieu aquatique. Une douzaine ont des rejets liquides; elles sont listées à l’annexe 3.
Significatives d’un point de vue environnemental en raison de leurs effluents
riches en matière organique, notons la présence de plusieurs entreprises
industrielles oeuvrant dans l’agro-alimentaire, dont deux dans la
transformation du lait et les autres dans la transformation de la viande. Elles
sont établies, de l’amont vers l’aval, dans les municipalités de
Lac-Etchemin, Frampton, Sainte-Claire, Saint-Anselme, Saint-Henri et
Sainte-Hénédine. Les entreprises industrielles rejetant les charges les
plus importantes dans le milieu aquatique sont Salaisons Brochu inc. à
Saint-Henri, Charcuterie Roy inc. et Exceldor, coopérative avicole, à
Saint-Anselme ainsi que la fromagerie du Groupe Lactel à Lac-Etchemin, laquelle
a fermé ses portes en 1999.
Interventions d’assainissement
Depuis l’instauration du Programme d’assainissement des eaux du Québec (PAEQ) en 1978, plusieurs efforts ont été consentis au niveau municipal et
industriel pour traiter les rejets d’origine ponctuelle.
Du côté municipal, sur le bassin de la rivière Etchemin, seule la
municipalité de Saint-Nazaire-de-Dorchester ne possède ni réseau d’égouts,
ni ouvrages d’assainissement. Les treize autres municipalités du bassin
bénéficient d’une station d’épuration pour traiter leurs eaux usées. À
l’exception de la station d’épuration de Frampton, toutes les stations ont
été construites dans le contexte du Programme d’assainissement des eaux
usées (PAEQ). Ces dernières utilisent un procédé de déphosphatation de
leurs eaux usées de mai à octobre, sauf celle de Saint-Luc; elles ont toutes
reçu leur avis de conformité aux exigences gouvernementales en matière d’épuration
des eaux. L’état d’avancement des travaux d’assainissement urbain par
secteur se trouve au tableau 2; la ventilation de ces mêmes données par
municipalité est présentée à l’annexe 2.
Plusieurs entreprises industrielles effectuent des traitements sur le site
même de l’usine, avant de faire parvenir ou non leurs eaux usées aux
stations d’épuration municipales. Sur le bassin de la rivière Etchemin, les
prétraitements peuvent consister en l’un ou l’autre des systèmes
suivants : dégrillage, trappe à graisse, tamis rotatif, traitement
physico-chimique ou réacteur biologique séquentiel (RBS). Ce dernier type de
traitement est particulièrement efficace pour l’enlèvement de l’azote
ammoniacal, qui se fait soit par nitrification ou décantation. On trouve des
RBS à Saint-Henri, pour traiter les eaux fortement chargées de Salaisons
Brochu inc., lesquelles sont ensuite acheminées aux étangs aérés municipaux,
ainsi qu’à Saint-Anselme, pour traiter les eaux usées de l’important
abattoir de volailles d’Exceldor, coopérative avicole, qui rejette ensuite
ses eaux usées traitées à la rivière. Ces deux RBS ont été mis en service
à la fin des années 1993 et 1994, soit après la diffusion du premier rapport
faisant état de la qualité de l’eau de la rivière Etchemin (Robitaille,
1995). Il est à noter que contrairement aux étangs aérés municipaux qui
nitrifient indirectement l'azote ammoniacal durant la période estivale
seulement, le procédé de nitrification des RBS a lieu à longueur d’année.
L’information relative à l’assainissement industriel sur le bassin de la
rivière Etchemin est regroupée à l’annexe 3.
Tableau 2 - État d’avancement des
travaux d’assainissement urbain et croissance démographique de 1979 à 1998
sur le bassin de la rivière Etchemin
Caractéristiques |
Secteur amont |
Secteur aval |
Total |
Assainissement urbain |
Population |
· avec ouvrages d’assainissement 19791 |
6 9252 |
2 5003 |
9 025 |
· avec ouvrages d’assainissement 19934 |
10 5355 |
8 730 |
19 265 |
· avec ouvrages d’assainissement 19996 |
10 110 |
18 287 |
28 397 |
· % desservi par des ouvrages d’assainissement
1999 |
72 % |
65 % |
67 % |
Ouvrages d’assainissement |
· en service 19791 |
42 |
03 |
4 |
·· avec avis
de conformité |
0 |
0 |
0 |
· en service 19934 |
6 |
2 |
8 |
·· avec avis
de conformité |
4 |
2 |
6 |
· en service 19996 |
8 |
5 |
13 |
·· avec avis
de conformité |
7 |
5 |
12 |
Démographie7 |
Population 1979 |
13 370 |
15 610 |
29 266 |
Population 1993 |
14 017 |
23 642 |
37 659 |
Population 1998
|
14 053 |
28 345 |
42 398 |
% de variation 1979-1998 |
5,1 |
81,6 |
44,9 |
1 Source : Ministère de l’Environnement, Direction du
suivi de l’état de l’environnement, Michel Groleau, communication
personnelle, janvier 2000.
2 En 1979, chacune des municipalités de Lac-Etchemin,
Saint-Damien-de-Buckland et Sainte-Claire possédait une station d’épuration
pour traiter ses eaux usées. Celles-ci ont été remplacées au cours des
années suivantes par des ouvrages d’assainissement plus performants, dans le
contexte du Programme d’assainissement des eaux usées du Québec (PAEQ).
3 En 1979, la municipalité de Saint-Jean-Chrysostome possédait une
petite station d’épuration qui a été remplacé en 1988 par une station plus
performante.
4 Source : Ministère de l’Environnement, Direction de l’assainissement
urbain, juillet 1993.
5 Selon les références consultées, la population desservie par la
station d’épuration de Lac-Etchemin était plus élevée en 1993 qu’en
1999.
6 Source : Ministère des Affaires municipales et de la
Métropole, Direction des infrastructures, avril 1999.
7 Source : |
Répertoire des municipalités du Québec, 1980, 1981. Direction des
communications, Ministère des Affaires municipales, 599 pages. |
Répertoire des municipalités du Québec, 1994. Publications du
Québec, 926 pages. |
Institut de la statistique du Québec, janvier 2000. Site Internet. |
Enfin, de 1988 à 1998, 7,5 millions de dollars ont été versés en
subventions pour assainir le milieu agricole, principalement pour la
construction de structures d’entreposage des fumiers; 63 % des sommes ont
été investies dans le secteur aval. L’annexe 4 dresse la liste des
sommes investies dans chaque municipalité pour l’assainissement agricole.
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