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Biosolides et substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS)

Les biosolides et certains contaminants d’intérêt émergent (CIE) ont fait l’objet de plusieurs reportages dans l’actualité récente. Ci-dessous, nous apportons des compléments d’information et présentons les actions du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) quant à l’encadrement du recyclage des biosolides et au suivi des CIE dans l’environnement.

Questions soulevées à la suite de la diffusion à Radio-Canada des émissions La semaine verte le 26 novembre et Enquête le 1er décembre 2022

Le MELCCFP a participé dernièrement à deux reportages portant sur le recyclage des biosolides municipaux au Québec et sur leur importation des États-Unis. Ces reportages ont présenté la filière du recyclage de ces matières ainsi que les collaborations scientifiques qui ont lieu entre l’Université de Montréal, l’Université Laval, le MELCCFP et le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), pour améliorer les connaissances sur l’utilisation des matières résiduelles fertilisantes (MRF) et la contamination par les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS). L’Université McGill et l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA) y collaborent également, bien qu’ils aient été omis dans le reportage. De plus, le traitement du sujet, tel qu’il a été présenté, mérite d’être nuancé, et il apparait important d’apporter ici quelques compléments d’information.

Les PFAS et les biosolides

Parmi les contaminants susceptibles de se retrouver dans l’environnement et dans les biosolides, on compte certains PFAS pour lesquels les avancées scientifiques récentes soulèvent de nouvelles préoccupations pour la santé humaine ou environnementale. Les PFAS sont des contaminants d’intérêt émergent (CIE). Ils sont utilisés dans la fabrication de nombreux biens de consommation pour leurs propriétés imperméabilisantes et antitaches. Même s’il est reconnu que certains PFAS peuvent avoir un impact sur la santé humaine, à l’instar de nombreux CIE, il manque actuellement de données toxicologiques et épidémiologiques sur la majorité de ces substances, et notamment sur les contextes d’exposition pouvant affecter directement la santé humaine.

Certains PFAS sont reconnus comme étant persistants dans l’environnement, et il n’est pas rare d’en retrouver en faibles concentrations dans les eaux partout sur la planète. Il convient toutefois de mentionner que leur détection ne signifie pas nécessairement un risque pour la santé humaine ou environnementale. Depuis 2007, le MELCCFP réalise le suivi de ces substances dans les eaux du Québec. Les concentrations maximales mesurées jusqu’à présent sont inférieures aux valeurs actuellement recommandées par Santé Canada pour l’eau potable. Le MELCCFP utilise notamment ces informations à titre d’indicateurs du niveau de risque de présence au Québec. Les données disponibles à ce jour appuient le portrait d’une réalité différente de celle dépeinte dans les reportages.

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Norme canadienne provisoire et données sur les PFAS dans les biosolides québécois

L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a annoncé, le 19 mai 2023, son intention de collaborer sur un projet de norme provisoire pour les PFAS dans les biosolides importés ou vendus au Canada en tant qu’engrais. La norme provisoire proposée exigera que ces biosolides contiennent moins de 50 ppb de sulfonate de perfluorooctane (PFOS).

Le PFOS est l’un des PFAS le mieux caractérisé à ce jour et reconnu comme toxique, persistant et bioaccumulable. Bien qu’une réglementation fédérale interdise depuis 2008 la fabrication, l’utilisation, la vente et l’importation au Canada du PFOS, ce dernier est généralement retrouvé en faible concentration dans tous les biosolides, résultat de l’omniprésence de ce PFAS dans notre environnement (air, sol, eau, produits de consommation). De plus, des substances dérivées ont été créées par l’industrie pour les remplacer. Ces nouveaux PFAS pourraient entraîner la formation de substances perfluorées comme le PFOS s’ils se retrouvent dans les eaux brutes, et ainsi augmenter les teneurs en PFOS dans les biosolides. La proposition de l’ACIA est donc d’utiliser le PFOS comme indicateur intérimaire pour la présence de PFAS dans les biosolides.

À l’heure actuelle, 100 % des résultats préliminaires d’analyses de biosolides dont dispose le MELCCFP sont en dessous de cette proposition de norme provisoire. Ces analyses ont été réalisées sur 47 échantillons de biosolides municipaux, papetiers et MRF issues de biosolides municipaux (composts, digestats, cendres, etc.) dans le cadre du projet de recherche en cours en collaboration avec l’Université de Montréal. Les échantillons ont été analysés en duplicatas et les résultats demeurent préliminaires, des analyses et des échantillons étant en cours de vérification. Les résultats sont présentés dans le graphique ci-dessous. Avec une moyenne de 4,07 ppb de PFOS, soit plus de 10 fois sous la norme proposée, ces résultats préliminaires sont rassurants quant à la qualité environnementale des MRF québécoises.

Tableau des concentrations moyennes en PFOS dans les biosolides et MRF dérivées de biosolides québecois

Le MELCCFP accueille favorablement la proposition de cette norme provisoire et évaluera cette proposition de l’ACIA. D’ailleurs, le MELCCFP continue de travailler en collaboration avec ses homologues du gouvernement fédéral pour assurer une utilisation sécuritaire des biosolides, quel que soit le niveau d’encadrement applicable (provincial ou fédéral).

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Situation au Maine

Plusieurs cas de contamination de terres agricoles à la suite d’épandages de biosolides ont été révélés au grand jour ces dernières années au Maine. Le résultat des enquêtes locales a révélé que ces contaminations seraient très probablement le fruit d’épandages de biosolides contaminés par des rejets industriels, issus d’usines utilisant des PFAS directement dans leurs procédés de fabrication, et donc contenant de fortes concentrations de PFAS. Ces épandages auraient eu lieu il y a au moins 15 à 20 ans, voire il y a plus d’une trentaine d’années. Depuis, les gouvernements américains successifs ont mis en place plusieurs mesures afin de réduire à la source les rejets de PFAS, de sorte qu’il est peu probable que les biosolides générés aujourd’hui au Maine contaminent des terres agricoles. Il demeure néanmoins que les concentrations de fond au Maine pourraient être plus élevées qu’au Québec. C’est pourquoi le Québec désire faire preuve de prudence face à l’épandage de biosolides provenant de l’extérieur du pays sur les terres agricoles de son territoire et a interdit cette activité, dans un premier temps, par la publication de l’addenda no 8 (PDF, 309 ko) au Guide sur le recyclage des matières résiduelles fertilisantes le 2 mars 2023. De plus, le MELCCFP a introduit cette même interdiction dans le Règlement sur les exploitations agricoles en cours de modification. Parallèlement, le Québec continuera à travailler avec ses partenaires fédéraux et provinciaux pour accroitre les contrôles frontaliers des importations de biosolides et, au besoin, établir des normes nationales de qualité pour le contenu en PFAS des biosolides valorisables au Québec.

Le recyclage des biosolides industriels et municipaux : une pratique sécuritaire au Québec

Une réglementation fédérale interdit depuis plusieurs années la fabrication, l’utilisation, la vente et l’importation au Canada des PFAS les plus toxiques, persistants et bioaccumulables. Cette mesure règlementaire résulte de la mise en application de la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants signée et ratifiée par le Canada en 2001. Ce règlement permet entres autres de diminuer significativement la probabilité de contamination directe des biosolides canadiens par les procédés industriels et de réduire, ainsi, les risques de présence de PFAS reconnus comme les plus toxiques en fortes concentrations dans les biosolides du Canada et du Québec. Par ailleurs, l’absence d’industries qui produisent ces PFAS au Québec contribue à minimiser le risque de leur présence en fortes concentrations dans les eaux usées et, par conséquent, dans les biosolides.

Grâce aux mesures réglementaires restreignant la fabrication et l’utilisation de PFAS dans les procédés industriels, les concentrations actuellement retrouvées dans l’environnement au Québec demeurent en deçà des recommandations actuelles basées sur la protection de la santé humaine et de la vie aquatique. Plusieurs rapports sont d’ailleurs disponibles sur notre site Web concernant les concentrations de PFAS dans les eaux potables, les eaux souterraines ou les milieux aquatiques.

Le gouvernement du Québec prend très au sérieux la qualité des terres agricoles sur son territoire et la préservation de la santé des citoyennes et des citoyens. C’est pourquoi des règles claires ont déjà été établies, par exemple l’imposition de contraintes limitant les risques d’accumulation de métaux ou encore l’interdiction d’utiliser les biosolides municipaux sur des cultures destinées à l’alimentation humaine, pour prévenir toute contamination des cultures avec des pathogènes humains, comme la bactérie E. coli, qui pourraient rendre les consommateurs malades.

Pour en savoir plus sur les suivis des CIE, y compris les PFAS, réalisés par le MELCCFP :

Berryman, David et al. 2012. Les composés perfluorés dans les cours d’eau et l’eau potable du Québec méridional, Québec, Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs, Direction du suivi de l’état de l’environnement. 35 pages + 2 annexes. ISBN 978-2-550-65565-7

Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 2017. Contaminants d’intérêt émergent, substances toxiques et état des communautés de poissons dans des cours d’eau de la Montérégie et de l’Estrie. 62 pages. ISBN 978-2-550-76344-4

Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 2018. Contaminants d’intérêt émergent, substances toxiques et état des communautés de poissons dans des cours d’eau des Laurentides et de Lanaudière. 50 pages + 4 annexes. ISBN 978-2-550-82528-9

Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 2020. Contaminants d’intérêt émergent, substances toxiques et état des communautés de poissons dans des cours d’eau du Québec méridional. 79 pages. ISBN 978-2-550-85483-8

Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 2020. Rapport sur l’état des ressources en eau et des écosystèmes aquatiques du Québec. 480 pages. ISBN 978-2-550-87855-1

Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 2022. Composés perfluorés dans l’eau potable au Québec – Suivis réalisés de 2016 à 2021. 21 pages. ISBN 978-2-550-91841-7

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Le gouvernement du Québec, un précurseur en matière de surveillance des contaminants d’intérêt émergent présents dans les matières résiduelles fertilisantes

Contrairement aux idées véhiculées récemment, le MELCCFP agit de façon éclairée en termes de surveillance des nouveaux contaminants, dont les PFAS, dans les matières résiduelles fertilisantes. En effet, il procède à des études comparatives de divers indicateurs dont l’élaboration et l’interprétation sont soumises à une approche scientifique rigoureuse. En 2007, il a élaboré une méthode d’analyse des PFAS dans l’eau parmi les plus performantes au monde et qui n’a cessé de se raffiner depuis. Les appareils analytiques sont également de plus en plus performants, de sorte qu’il est aujourd’hui possible de mesurer les PFAS dans l’eau en très faibles concentrations. Le MELCCFP est aussi actif sur le plan de la recherche scientifique pour l’élaboration de méthodes de détection et de quantification des PFAS dans d’autres matrices comme les sols, les sédiments et les biosolides, comme en témoignent les diverses publications scientifiques produites par les experts du MELCCFP dans ce domaine.

Le gouvernement du Québec surveille de très près l’évolution des connaissances et demeure au diapason des recommandations basées sur la science. En 2016, le MELCCFP a fait évaluer son encadrement du recyclage des biosolides par l’Institut national de santé publique du Québec. Celui-ci a conclu qu’il était sécuritaire selon l’état des connaissances et il a recommandé d’effectuer une veille scientifique pour assurer le maintien de cette sécurité. C’est pourquoi, en plus de l’analyse des rapports de suivi des PFAS dans l’environnement publiés par les autres gouvernements, le MELCCFP réalise présentement un projet de recherche en collaboration avec le Dr Sébastien Sauvé, un chercheur de l’Université de Montréal internationalement reconnu pour son expertise sur les CIE, afin de brosser un portrait de la présence des PFAS et d’autres CIE dans les biosolides municipaux à travers le Québec. Ces nouvelles données seront utilisées par le MELCCFP pour identifier et circonscrire les éléments pouvant constituer un risque réel d’exposition pour la population ou l’environnement en contexte québécois afin d’apporter, le cas échéant, les ajustements appropriés à la règlementation en vigueur.

Pour en savoir plus sur l’implication du MELCCFP dans l’avancée des connaissances scientifiques en lien avec les PFAS (articles et rapports scientifiques ayant au moins un expert du MELCCFP comme auteur) :

Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. 2015. Tragédie ferroviaire de Lac-Mégantic – Évaluation du risque écotoxicologique associé à la contamination des sédiments de la rivière Chaudière. Centre d’expertise en analyse environnementale du Québec. 46 pages + annexes. ISBN 978-2-550-73936-4.

Mejia-Avendaño, Sandra, et al. "Novel fluoroalkylated surfactants in soils following firefighting foam deployment during the Lac-Megantic railway accident." Environmental science & technology 51.15 (2017): 8313-8323.

Munoz, Gabriel, et al. "Environmental occurrence of perfluoroalkyl acids and novel fluorotelomer surfactants in the freshwater fish Catostomus commersonii and sediments following firefighting foam deployment at the Lac-Mégantic railway accident." Environmental science & technology 51.3 (2017): 1231-1240.

Munoz, Gabriel, et al. "Environmental occurrence of perfluoroalkyl acids and novel fluorotelomer surfactants in the freshwater fish Catostomus commersonii and sediments following firefighting foam deployment at the Lac-Mégantic railway accident." Environmental science & technology 51.3 (2017): 1231-1240.

Kaboré, Hermann A., et al. "Worldwide drinking water occurrence and levels of newly-identified perfluoroalkyl and polyfluoroalkyl substances." Science of The Total Environment 616 (2018): 1089-1100.

Munoz, Gabriel, et al. "Bioaccumulation of zwitterionic polyfluoroalkyl substances in earthworms exposed to aqueous film-forming foam impacted soils." Environmental Science & Technology 54.3 (2020): 1687-1697.

Munoz, Gabriel, et al. "Target and nontarget screening of PFAS in biosolids, composts, and other organic waste products for land application in France." Environmental Science & Technology 56.10 (2021): 6056-6068.

Kaboré, Hermann A., et al. "Novel and legacy per-and polyfluoroalkyl substances (PFAS) in freshwater sporting fish from background and firefighting foam impacted ecosystems in Eastern Canada." Science of The Total Environment 816 (2022): 151563.

Jarjour, Julie, et al. "Reduced bioaccumulation of fluorotelomer sulfonates and perfluoroalkyl acids in earthworms (Eisenia fetida) from soils amended with modified clays." Journal of Hazardous Materials 423 (2022): 126999.

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Les biosolides : une avenue avantageuse pour améliorer la qualité des sols et lutter contre les changements climatiques

Considérant l’ensemble des données disponibles, l’épandage des biosolides québécois demeure une solution de gestion responsable et durable sur le plan environnemental, en plus de comporter un avantage indéniable sur le plan agronomique grâce aux apports en matière organique et en nutriments que permettent ces matières. En effet, l’enfouissement de la matière organique dans les lieux d’élimination génère du méthane, un gaz à effet de serre (GES) dont le potentiel de réchauffement planétaire est 25 fois plus élevé que celui du CO2, tandis que l’incinération dégage des oxydes nitreux (N2O), un GES 298 fois plus puissant que le CO2, selon Environnement et Changement climatique Canada. Une part significative de ces GES échappe aux méthodes de captage des lieux d’élimination et se retrouve dans l’atmosphère. Retourner au sol la matière organique qui a été traitée contribue à limiter ces impacts sur l’environnement. La rétention d’une partie du carbone dans le sol pendant plusieurs années permet de nourrir et d’accroitre les populations de vers de terre et de microorganismes, ce qui améliore la fertilité des sols. Ainsi, en s’appuyant sur le caractère prudent et sécuritaire des règles québécoises actuelles qui encadrent le recyclage des biosolides en milieu agricole, l’utilisation des biosolides constitue une bonne pratique et devrait être préférée à l’usage d’engrais chimiques.

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter la fiche d’information Les biosolides municipaux produite par RECYC-QUÉBEC.

Les éléments présentés ci-dessus sont des faits concrets qui permettent à chacun de poser un regard plus éclairé sur la situation des PFAS, sur leur présence dans les biosolides et sur leur suivi par le MELCCFP. La présence de PFAS dans l’environnement et dans les biosolides est avant tout une responsabilité collective, découlant de nos modes de vie et de nos produits de consommation. En effet, les biosolides ne sont pas des générateurs de PFAS, mais bien un indicateur de leur présence globale dans notre société et notre quotidien. Sans sources de PFAS, pas de PFAS dans nos biosolides. L’enjeu réel de la contamination environnementale par les PFAS se trouve donc bien au-dessus de nos toilettes! Sur des sujets aussi complexes que les PFAS, seule l’information, issue de sources différentes, peut nous permettre de bâtir notre objectivité collective.

Le MELCCFP continuera à collaborer avec la communauté scientifique pour contribuer à cette connaissance.

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