Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs
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Présence de pesticides dans l’eau de surface au Québec

Zones de vergers et de cultures maraîchères, 2013 à 2016

Résumé

Chaque année, le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques échantillonne des cours d’eau des régions agricoles du Québec pour y vérifier la présence de pesticides. Au fil des ans, un réseau permanent du suivi des pesticides (réseau de base) composé de dix stations a été mis en place pour suivre l’évolution des concentrations de pesticides dans des cours d’eau à proximité de cultures ciblées. Le rapport présente les résultats de l’échantillonnage réalisé entre 2013 et 2016 pour quatre de ces stations. Deux stations sont situées dans des secteurs où les cultures maraîchères sont importantes; il s’agit des ruisseaux Gibeault-Delisle et Norton dans la zone des « terres noires » du bassin versant de la rivière Châteauguay. Les deux autres stations sont le ruisseau Rousse, à Oka, et le ruisseau Déversant-du-Lac, à Rougemont. Ces deux cours d’eau sont situés dans des secteurs où les vergers de pommiers occupent des superficies relativement importantes, mais où d’autres secteurs de production sont également présents.

Dans les deux cours d’eau des secteurs maraîchers, les ruisseaux Gibeault-Delisle et Norton, on trouve une grande diversité de pesticides dans l’eau, dont plusieurs sont en concentrations qui dépassent les critères de qualité de l’eau pour la protection des espèces aquatiques.

Dans le ruisseau Gibeault-Delisle, 38 substances ont été détectées en 2013 2014, soit 14 herbicides, 12 insecticides, 6 fongicides et 6 produits de dégradation. Tous les échantillons prélevés dépassent au moins un des critères de qualité de l’eau pour la protection des espèces aquatiques (critère de vie aquatique chronique ou CVAC). Parmi les pesticides détectés, 12 sont responsables de ces dépassements. Ce sont les herbicides métribuzine, linuron et diméthénamide, les insecticides imidaclopride, clothianidine, thiaméthoxame, chlorpyrifos, diazinon, carbaryl et malathion, et les fongicides chlorothalonil et azoxystrobine. Le métribuzine, le diméthénamide et le linuron montrent des maxima élevés, respectivement 43 µg/l, 450 µg/l et 960 µg/l, qui dépassent le CVAC. D’ailleurs, l’analyse statistique révèle que les herbicides linuron et métribuzine montrent une hausse significative des concentrations en 2013 2014 par rapport à 2006 2007. Les néonicotinoïdes dépassent parfois le CVAC avec une forte amplitude. Une concentration de 11 µg/l de clothianidine détectée en 2013 correspond à 55 fois le critère de vie aquatique aigu (CVAA) de 0,2 µg/l.

Bien que, globalement, la situation se soit peu améliorée depuis l’échantillonnage réalisé en 2006 2007, on note néanmoins une amélioration en ce qui concerne l’insecticide chlorpyrifos. Le produit est détecté moins souvent dans le ruisseau Gibeault-Delisle qu’en 2006 2007 et dépasse moins souvent les critères de qualité de l’eau. De plus, l’analyse statistique montre une baisse significative des concentrations de ce produit entre 2006 2007 et 2013 2014.

Le ruisseau Norton reçoit les eaux du ruisseau Gibeault-Delisle et de plusieurs autres petits cours d’eau. Au total, 40 substances y ont été détectées, soit 18 herbicides, 9 insecticides, 6 fongicides et 7 produits de dégradation. Les pesticides présents sont à peu près les mêmes que dans le ruisseau Gibeault-Delisle, mais les concentrations y sont généralement plus faibles en raison de la dilution. Cependant, malgré des concentrations plus faibles que dans le ruisseau Gibeault-Delisle, tous les échantillons prélevés en 2013 et 2014 dépassent au moins un des critères de qualité de l’eau pour la protection des espèces aquatiques pour l’un ou l’autre des pesticides détectés. Dix pesticides dépassent les critères de qualité de l’eau (CVAC) : les herbicides linuron, diméthénamide et bromoxynil, et les insecticides imidaclopride, clothianidine, thiaméthoxame, chlorpyrifos, diazinon, carbaryl et malathion. Les insecticides de la famille des néonicotinoïdes et le chlorpyrifos y sont responsables de la plupart des dépassements des critères de qualité de l’eau, soit dans 70 % et plus des échantillons.

On a aussi détecté dans les deux cours d’eau la présence du chlorprophame, un pesticide intégré au suivi environnemental en 2014. Ce pesticide est utilisé pour le traitement des pommes de terre en entrepôt. La détection du produit dans les deux ruisseaux soulève un questionnement sur l’impact du rejet des eaux de lavage des légumes.

Dans les bassins des ruisseaux Déversant-du-Lac et Rousse, on trouve des superficies relativement importantes de vergers, mais également d’autres secteurs de production. Parmi les 25 pesticides détectés dans le ruisseau Déversant-du-Lac, le S métolachlore, l’atrazine et le glyphosate sont les herbicides détectés le plus souvent, soit en moyenne dans respectivement 100 %, 98 % et 81 % des échantillons prélevés en 2015 et 2016. Les pesticides qui dépassent occasionnellement les critères de qualité de l’eau sont les herbicides atrazine et S métolachlore, ainsi que les insecticides thiaméthoxame, clothianidine et imidaclopride de la famille des néonicotinoïdes et le chlorpyrifos. La plupart sont associés aux cultures de maïs et de soya. Par rapport à la campagne d’échantillonnage précédente (2010 2011), on note en 2015 2016 une augmentation significative des concentrations pour le S métolachlore et pour le fongicide azoxystrobine, mais une baisse pour les insecticides clothianidine et thiaméthoxame, de même que pour l’herbicide bentazone.

Dans le ruisseau Déversant-du-Lac, on trouve aussi quelques produits utilisés dans les vergers, comme les insecticides thiaclopride, carbaryl, acétamipride et perméthrine ainsi que le produit de dégradation de fongicides ETU. Le thiaclopride est détecté en moyenne dans 67 % des échantillons, le carbaryl, dans 12 %, et les autres produits, dans 1,7 % chacun. En 2015, le carbaryl et la perméthrine ont parfois été détectés en concentrations qui dépassent les critères de qualité de l’eau.

En 2015 2016, 38 pesticides ont été détectés dans le ruisseau Rousse, dont certains sont utilisés dans les vergers. C’est le cas des insecticides acétamipride, thiaclopride et carbaryl ainsi que du produit de dégradation de fongicides ETU. Ces produits ont été détectés dans 20 %, 10 %, 8,4 % et 10 % des échantillons respectivement. L’herbicide dichlobénil et son produit de dégradation, le 2,6 dichlorobenzamide, sont détectés en moyenne dans 1,7 % et dans 93 % des échantillons respectivement. Le dichlobénil est surtout utilisé dans les cultures de petits fruits, mais il est également homologué pour les vergers.

D’autres pesticides détectés sont plutôt associés aux cultures de maïs et de soya. C’est le cas du s-métolachlore, du bentazone, de l’atrazine et du glyphosate qui sont détectés en moyenne dans 100 %, 96 %, 95 % et 85 % des échantillons respectivement. La comparaison des données de 2010 2011 et de 2015 2016 montre une hausse significative des concentrations pour les herbicides S métolachlore et bentazone. Plusieurs pesticides détectés dans le ruisseau Rousse sont aussi associés aux cultures maraîchères. L’insecticide imidaclopride est détecté dans 96 % des échantillons, le thiaméthoxame, dans 73 % d’entre eux et le chlorpyrifos, dans 61 % des échantillons. Parmi les huit fongicides détectés, l’azoxystrobine est le produit qui est détecté le plus souvent, soit dans 96,5 % des échantillons, suivi de loin par le boscalide, détecté en moyenne dans 22 % des échantillons. Les concentrations de neuf pesticides dépassent les critères de qualité de l’eau pour la protection des espèces aquatiques. Mentionnons notamment l’imidaclopride, le thiaméthoxame, le chlorpyrifos, qui montrent des dépassements du CVAC dans plus de 50 % des échantillons et atteignent parfois des dépassements de forte amplitude. La comparaison des données de 2010 2011 et de 2015 2016 montre une hausse significative des concentrations des insecticides thiaméthoxame et imidaclopride et du fongicide azoxystrobine. Malgré des valeurs encore élevées, l’analyse statistique y révèle aussi une baisse significative des concentrations de l’insecticide chlorpyrifos.

Rapport (PDF, 2,5 Mo)


Référence bibliographique :

GIROUX, Isabelle (2017). Présence de pesticides dans l’eau de surface au Québec – Zones de vergers et de cultures maraîchères, 2013 à 2016. Québec, ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Direction de l’information sur les milieux aquatiques, ISBN 978-2-550-78847-8 (PDF), 47 p. + 3 ann.


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